Netflix ne cesse de surprendre avec des films documentaires de plus en plus ambitieux, originaux et hors du commun. Avec Voyeur, c’est la relation écrivain/sujet qui est traitée.
Dans le rôle de l’écrivain, Gay Telsea, journaliste new-yorkais. Ce fils de tailleur toujours habillé d’un costume sur mesure s’est fait connaître après la sortie de son roman « La femme de mon voisin » en 1980, une « plongée sans fard dans la sexualité des Américains ».
Quant au sujet, il n’est autre que Gerald Fools, patron d’un motel. Ce dernier a passé 30 ans à observer par de fausses grilles d’aération ses clients : sexe, meurtre, ou scène banale du quotidien, Fools est sans doute le plus grand voyeur jamais connu. Gay Telsea va prendre l’histoire de Fools, les deux hommes vont se rencontrer, l’écrivain ira même jusqu’à participer à une séance de voyeurisme dans le Motel de Fools.
Dans le documentaire, on est en 2016, Gay Telsea est sur le point de publier un dossier dans le prestigieux New Yorker « The Voyeur’s Motel », l’article a même fait la couverture du magazine. Quelques semaines plus tard suivra la publication du livre enquête du même titre. Les deux réalisateurs ont suivi les deux protagonistes chacun de leur côté, puis ensemble quand ces derniers devaient parler, faire une sorte de mise au point sur l’impact de l’article du New Yorker ou encore du livre.
Ce qui saute aux yeux, c’est la complexité de la relation entre Telsea (écrivain) et Fools (sujet). Les deux hommes se connaissent depuis les années 80, ils se fréquentent, s’admirent et se haïssent.
Fools est obsédé par Telsea, ce qu’il représente, ses costumes et les gens qu’il fréquente à New York, il veut faire partie du cercle de ce journaliste influent en lui offrant des histoires à la pelle. Telsea quant à lui est fasciné par Fools, les notes qu’a pris le voyeur pendant 30 ans, une vraie étude sur l’Amérique profonde, reste que l’écrivain ne se fie pas à une seule source et il aura raison.
La question de fond de ce documentaire est : qui manipule qui ? Depuis toujours, des journalistes ou écrivains se retrouvent piégés ou manipulés par leurs sujets. Dans Voyeur, on se balade dans le labyrinthe de cette relation qui ne cesse de nous fasciner, et on se rend compte que le prix d’une bonne histoire est souvent très élevé.